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8 novembre 2009 7 08 /11 /novembre /2009 13:04
Pour info, un nouveau papier dans CAUSEUR consacré au cinéma de Bertrand Tavernier.





Ouais, je sais, le sujet pourrait paraître chiant à première vue, mais je chronique son superbe film « Dans la brume électrique » qui vient juste de sortir en DVD. Film américain, dont le rôle titre est tenu par un Tommy Lee Jones au sommet de son art. Film bougon, un brin neurasthénique, tristounet, qui s'inscrit dans la lignée d'autres grands films « noirs » de Tavernier, tels que « Coup de torchon » ou « L.627 ».





On y découvre un Tavernier quasiment désespéré et bien éloigné de son image médiatique d'engagé compulsif...

Bonne lecture !








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8 septembre 2009 2 08 /09 /septembre /2009 14:11
Voilà mon grand come-back sur le légendaire site NanarLand.com...





"
François-Xavier Ajavon, toujours lui, se penche sur le cas du film Le Jour et la Nuit, de notre philosophe mondain Bernard-Henri Levy. Une brillante réflexion sur la question de la temporalité et de sa perception subjective qui, en filigrane, esquisse la réponse à cette autre interrogation essentielle : quelle est la différence entre BHL et un cinéaste ? C'est le jour et la nuit..."





Il était une fois un écrivain bavard, plus connu pour son décolleté que pour ses livres, aux indignations bruyantes et à l'omniprésence médiatique insupportable, qui a décidé un jour de faire du cinéma. L'affaire est très ancienne, bien antérieure au projet « Le Jour et la Nuit ». Une rencontre avec Louis Aragon en 1976 donne au jeune BHL, alors quasiment inconnu, de jouer un rôle dans l'adaptation télévisée du roman Aurélien par Michel Favart. On voyait notamment le philosophe nu, dans une scène d'amour avec Françoise Lebrun. BHL déclarait dans le Point en 1997 qu'il avait eu en projet peu de temps après – dans les années 80 – d'adapter au cinéma pour Daniel Auteuil son propre livre sur Baudelaire (Le sombre drame de Charles Baudelaire). Il revenait ainsi sur cette improbable carrière d'acteur avortée : « [un] projet que m'avaient mis dans la tête Albert Cohen et Daniel Toscan du Plantier, du temps qu'il dirigeait la Gaumont : jouer le rôle de Solal dans une adaptation de « Belle du seigneur ». Ça n'a pas pu se faire. C'est dommage. Parce que voilà une chose – jouer Solal – qui m'aurait réellement plu. » Acteur sur les plateaux de télé, acteur sur les plateaux de cinéma, même combat ? Se vivant certainement comme l'héritier d'un certain journalisme « de combat », celui d'Hemingway ou de Malraux lors de la guerre d'Espagne, BHL s'engage dans divers projets de documentaires au fil des années 90 afin de témoigner sur les douleurs du monde. En 1992 il tourne pour France 3 Un jour dans la mort de Sarajevo, autour de la guerre de Bosnie. Deux ans plus tard il récidive avec le long-métrage documentaire Bosna, qui sera sélectionné par Gilles Jacob, au Festival de Cannes, dans la section « Un certain regard ».


La
suite.




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PS : les germanophones apprécieront. Et moi aussi ;-)



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7 juin 2009 7 07 /06 /juin /2009 09:51
Pour info, dans le contexte de la sortie du film « Home » du photographe Yann Arthus-Bertrand, télévangéliste écolo dégoulinant de bons sentiments et maître du green-business sauce « société du spectacle », j’ai pondu pour Causeur un petit portrait moqueur du moustachu le plus classe de la communauté des adorateurs de la nature, tendance « apocalypse now ». Cela s’intitule « Yann Arthus-Bertrand, go Home ! »





 Vous noterez qu’à la fin je suis quand même gentil, ce qui est dans ma nature profonde ;-)





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28 mars 2009 6 28 /03 /mars /2009 15:19
Pour info : voici un petit texte tendre et revigorant consacré à nos amis les activistes de l’ultra-gauche...  « Monoprix Toulouse : la propriété, c’est le vol ! »





Récit, sous forme de gonzo-reportage assumé, de la dévastation méthodique – et festive - d’un Monoprix provincial, par des hordes de jeunes sauvages… Keffiehs avantageux. Punks-à-chiens. Midinettes anti-racistes en psycho. Décroissants babas écolos à vélo. Chômeurs activistes encartés à la CGT. Profs bobos « en luttes », et à lunettes. Etc., etc…


A la


Bref, la propriété c’est le vol ! Et demain.... je rase gratis !



moi



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30 octobre 2008 4 30 /10 /octobre /2008 23:12
Bon, allez... je remets enfin ça dans la rubrique "philo" du mythique site web Nanarland.com... en m'attaquant à l'ultimesque nanar "Under Siege"/"Piège en haute mer" interprété par l'immense acteur Steven Seagal...



"Après "Road House", François-Xavier Ajavon s'attaque à la richesse thématique de "Piège en haute mer" et, subséquemment, au singulier pugilat artistique de Steven Seagal, notre marin existentialiste préféré. Un texte d'une lucidité exemplaire."

Hhhummm...... ah ah ah !

"Pour résister aux pédants petits cornichons qui persistent à nous accabler d’un vocabulaire technique pompeux à propos du cinéma, poursuivons notre exploration pseudo-philosophique de l’univers nanar.


On m’objectera que Piège en haute mer n’est pas un vrai nanar, selon les normes de l’Académie internationale du nanar. Certes. Mais le jeu tout en nuance et subtilité de Steven Seagal le classe quand même dans le champ des grosses bouses d’action yankee, limites mongoliennes mais tellement jubilatoires… Suite de la série « A la recherche de la substantifique moelle spirituelle des nanars… »"









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23 décembre 2007 7 23 /12 /décembre /2007 19:14
AudreyHepburn.jpgLe blog Apocoloquintose a décidé de se la jouer « cinémascope » et « technicolor » en cette fin d’année et a pu aligner, pour les fêtes, un budget conséquent afin d'inviter une star hollywoodienne ( la plus charmante de toutes ? ) pour vous souhaiter un joyeux noël…


Je me suis permis d’inviter Audrey Hepburn, pour vous souhaiter un très joyeux noël et une bonne année 2008. Voici un extrait du film Breakfast at Tiffany’s ( titre : Diamants sur canapé pour la distribution française ), de Blake Edwards, datant de 1961 : il s’agit de la scène où la belle Holly chante, en s’accompagnant à la guitare ( puis à l’orchestre symphonique, sur la fin… ) la fameuse chanson « Moon river ».  La musique de ce film romantique ( l’histoire d’amour entre une beauté un peu frivole et un écrivain taciturne et fauché… ) est signée par le grand compositeur Henry Mancini, qui remporta, pour ce film, l’Oscar de la meilleure BOF. Le film est adapté du roman éponyme de Truman Capote.








On s’exaltera, aussi, de la version du chanteur pop Morrissey. ( Chanteur qui a fait l’objet, sur ce blog, d’un récent billet amical ).


On s’enrichira, pour finir, de cette version quelque peu datée, en noir et blanc, où Henry Mancini en personne interprète son œuvre au piano, et à la télé, accompagné par un grand orchestre symphonique.





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8 décembre 2007 6 08 /12 /décembre /2007 11:13
passe-du-diable-copie-1.jpg
Alors que l’Afghanistan est encore à feu et à sang, déchiré par des attentats quotidiens, le mythique cinéaste et romancier Pierre Schoendoerffer a rendu une visite de courtoisie aux « paras » français qui sont actuellement en opération sur place, dans le cadre de l’ISAF.

C’était un retour aux sources, pour le vieux « Crabe » après le film « La passe du diable » qu’il a réalisé sur place, avec Joseph Kessel, au milieu des années 50…  Compte-rendu de cette visite et analyse.



(Texte publié initialement sur le blog de Jérôme Di Costanzo. )


par François-Xavier Ajavon (1)

Une information importante, et émouvante, est passée presque inaperçue. Il y a quelques semaines, au début du mois de septembre, le romancier et cinéaste Pierre Schoendoerffer, 79 ans, a accompagné un régiment de l’armée française opérant en Afghanistan. L’événement, a fait l’objet d’une longue dépêche AFP le 15 septembre dernier, intitulée : « Pierre Schoendoerffer à Kaboul 50 ans plus tard avec son ancien régiment »(2) mais elle n’a été reprise par aucun grand média. Puis le 8 novembre Schoendoerffer a signé dans le Figaro une belle tribune : « A Kaboul avec les paras du 1er RCP ». L’évènement n’a pas eu plus d’écho que cela : une dépêche et une tribune de presse. Etonnant. C’était pourtant comme un retour aux sources, un pèlerinage en terre Sainte, un exil au berceau, pour le célèbre réalisateur, membre de l’Institut. On semble souvent oublier que l’auteur du « Crabe Tambour » a débuté sa carrière, en fanfare, dans l’ombre de Joseph Kessel, en co-réalisant le film « La passe du diable » ( 1956 ), un long-métrage documentaire sur l’Afghanistan.

Inutile de souligner ici ce que cette visite en terre afghane peut avoir de particulièrement symbolique, cinquante ans après la sortie de ce film… si Schoendoerffer n’a pas changé ( à peine quelques rides… ), si son film n’a pas trop mal vieilli (3), le pays a connu bon nombre de bouleversements, d’innombrables crises, et d’incessants combats dans ce laps de temps. En cinquante ans de solitude le visage de l’Afghanistan s’est complètement métamorphosé. Triste métamorphose, qui a mis le pays à terre.

« La Passe du diable », dont le scénario et la narration sont signés Kessel, est un portrait vivant et percutant du peuple Afghan. C’est un documentaire « romancé », mêlant séquences « mises en scène », organisées, écrites, et séquences spontanées, prises sur le vif. Au cœur de ce portrait filmé d’un peuple, il y a le sport, éternel liant universel entre les hommes. « La passe du diable » décrit l’entraînement âpre et viril de cavaliers préparant le grand tournoi royal de bouzkachi, se tenant à Kaboul. Pratique sportive ancestrale, le bouzkachi oppose des cavaliers devant se saisir de la carcasse d’un bélier et la déposer dans une zone matérialisée au sol. Un jeu violent et authentique, plein d’histoire et de noblesse, bien loin d’un quelconque folklore pour touristes. Dans « La Passe du diable », Schoendoerffer filme surtout le destin tragique de deux frères, issus d’un village reculé d’Afghanistan : le grand frère, Mokkhi, un émérite cavalier, un « tchopendoz », préparant le tournoi de bouzkachi, et son petit frère, Rahim, rêvant de devenir lui-même un « tchopendoz » et rejoignant clandestinement la capitale pour assister à l’événement royal. Le destin faisant toujours mal les choses ( et l’Afghanistan semble être un théâtre idéal pour que les destins les plus tragiques s’accomplissent ), le petit Rahim meurt accidentellement sous les sabots du cheval de son frère, alors que ce dernier sort victorieux de la mêlée furieuse.



BOUZKACHI.JPG
Cavaliers afghans



Accompagnant les hommes du 1er Régiment de chasseurs parachutistes ( opérant en Afghanistan dans le cadre de la Force Internationale d’assistance à la sécurité ISAF/Otan ), Schoendoerffer a évoqué sa nostalgie d’un pays jadis rayonnant et voluptueux, qu’il a connu au moment du tournage de ce film. Le Colonel Collet, commandant le 1er RCP, évoque sa rencontre avec le réalisateur : « Il nous a raconté un pays dont la culture était à l’époque encore très présente, très palpable. Ne serait-ce que dans les vestiges qu’il en restait un peu partout, mais qui malheureusement pour nous ont totalement disparu. » Que reste t-il de cette profondeur historique ? De cette épaisseur esthétique ? Plus grand-chose… Schoendoerffer fait référence au plateau du Bamiyan et aux bouddhas géants, taillés à flanc de montagne, détruits par les talibans en 2001. Dans le Figaro le cinéaste évoque le souvenir du patrimoine culturel afghan : « O la cuvette de Kaboul dans la poussière de sable rose ! Maymana au farouche cavalier tchopendoz du bouzkachi, Mazar-e Charif la sainte, Balkh, détruite comme Carthage, Kondôz, Faïzâbâd, les ruines de la ville rouge. Bamiyan, aux deux immenses bouddhas presque intacts. » (4) Un peuple qui détruit son patrimoine n’a plus aucun avenir. Et même Paris n’avait pas brûlé à la fin de la seconde guerre mondiale… L’Afghanistan n’aura mis que quelques années à s’autodétruire complètement, à s’automutiler jusqu’à la mort, à s’effacer de la carte géopolitique du monde.

« La passe du diable » est donc un témoignage saisissant sur un Afghanistan idéal, primitif, rural, et anti-moderne. En deux mots, le paysage onirique dans lequel Kessel et Schoendoerffer plongent les spectateurs relève de la mythologie. Et la mythologie d’un peuple en particulier, au-delà de la couche de folklore, de pittoresque, d’anecdotes inessentielles, de bavardages, révèle tout ce qu’il faut connaître d’universel sur l’homme. Les nobles cavaliers de la « Passe du diable » ont cette particularité de vivre avec une cruelle authenticité toute la palette des sentiments humains… ils vivent dans un monde où le sport est une puissante confrontation, ils vivent dans un monde où la douleur est une anti-chambre de la mort ; ils vivent dans un monde où l’honneur est un engagement absolu devant soi-même et les siens ; ils vivent dans un monde - sans profit - où la culture du clan n’offre pas d’alternatives ; ils vivent aussi, dans un monde où la liberté se traduit jusque dans les paysages. Ces cavaliers à la noblesse antique – descendants de Gengis Khan (5) - ne sont pas des surhommes dans l’esprit de Kessel, mais ce sont les visages radieux d’une anti-modernité enracinée.

Il y a une histoire d’amour entre Kessel et l’Afghanistan, une histoire passionnelle qui s’étirera sur quelques livres, de nombreux articles, et le film « La Passe du Diable ». Depuis son reportage « Le jeu du roi » ( récit de voyage de 1965 ), jusqu’aux « Cavaliers » ( 1967 :  vaste épopée reprenant le thème du tournoi de bouzkachi ), en passant par plusieurs participations à des films documentaires, notamment pour la télévision, Kessel a souvent fait le portrait de ces hommes d’Asie centrale, qui le fascinaient tant.



kessel.jpg
Joseph Kessel ( à gauche )


La rencontre entre Schoendoerffer et Kessel relève aussi du roman : « C’est dans une fumerie de Kowloon que Schoendoerffer raconta à Kessel son expérience indochinoise, la guerre, la découverte du monde, la captivité, les tentatives d’évasion » rapporte Yves Courrière dans sa biographie de Kessel (6). C’est dans ce contexte que le jeune Schoendoerffer raconta au vieux « lion » que le livre « Fortune carrée » ( 1932 ) avait été une révélation pour lui. L’amitié entre les deux hommes était scellée. Le cinéaste écrit dans le Figaro : « Il y a plus d'un demi-siècle (…) je rencontre Joseph Kessel à Hongkong. Kessel, le géant, dont les livres (ah ! Fortune carrée) ont bouleversé mon adolescence - qui me bouleversent encore aujourd'hui. » (7)

Quand le projet de « La Passe du diable » mûrit dans l’esprit de Kessel, l’écrivain imposa alors son jeune ami en tant que metteur en scène. Le producteur Georges de Beauregard, alors âgé d’une trentaine d’années s’enthousiasma immédiatement pour ce projet de docu-fiction lyrique sur l’Afghanistan (8). Yves Courrière indique : « Kessel le connaissait à peine mais comme il savait rire et bien boire – qualités essentielles à ses yeux – il le jugea seul capable de l’aider à réaliser un documentaire pour lequel il avait déjà l’opérateur rêvé : Pierre Schoendoerffer » (9).  L’aventure était pourtant risquée : le metteur en scène, Schoendoerffer, n’avait jamais réalisé de long-métrages et était issu du reportage d’actualité ; et le chef opérateur, Raoul Coutard, était un jeune photographe qui n’avait eu aucun contact physique avec une caméra… Schoendoerffer deviendra l’un des plus grands cinéastes de sa génération, et Raoul Coutard deviendra l’un des principaux « chef’op » de la « Nouvelle vague ». Le Centre national de la cinématographie française, co-financeur du projet, fut plus difficile à convaincre que Georges de Beauregard : Jacques Dupont, réalisateur diplômé de l’IDHEC fut greffé au projet, en gage de sérieux. Yves Courrière raconte la fête démentielle que Kessel offrit à l’équipe de son film, à la veille de son départ pour Kaboul : « Rien ne valait la vodka pour souder une équipe… et pour oublier l’angoisse (…) de l’interminable itinéraire emprunté par le Constellation d’Air India pour rallier New-Delhi par Genève, Athènes, Khartoum et Karachi » (10).

Le destin du film fut comme frappé par une malédiction : « Le résultat sera superbe… mais bien peu de cinéphiles auront le loisir d’en juger. Beauregard, en difficulté, avait cédé ses droits à une major company américaine qui avait épongé les dettes sans autre garantie. ‘La Passe du diable’ sortira, vierge de toute publicité, le 21 mai 1958, dans une seule salle des Champs-Elysées, et faute de spectateurs sera retirée de l’affiche au bout de quinze jours. » (11). Et Yves Courrière, biographe de Kessel, de chercher des explications logiques à cette désaffection du public : une France morne vivant la fin de la IV ème République, le vote de l’état d’urgence par l’Assemblée, la crise algérienne, etc… « La France se souciait plus des complots d’Alger que des splendeurs de l’Afghanistan » (12). Dix ans plus tard Kessel tenta de relancer le film, en organisant des projections au cinéma Publicis, mais l’immeuble du Drugstore Champs-Elysées fut détruit par les flammes peu de temps après. Une sorte de malédiction s’acharna donc sur ce film, qui reste encore à découvrir pour la plupart des amateurs de cinéma français (13)…

L’expérience cinématographique de Kessel et Schoendoerffer, dans « La Passe du diable », visait à « donner à voir » un pays tel que l’Afghanistan à travers le prisme de l’épopée humaine. A mille lieux des documentaires « ethnologiques » qui sont à présent légion sur tous nos écrans, et qui prétendent comprendre des groupes humains en les disséquant à travers un regard clinique, « La Passe du diable » ne prétend à rien d’autre qu’à saisir l’homme, l’homme éternel et universel derrière le masque du cavalier afghan. Antique cavalier afghan de fantasmes, occupé à ses violents combats de Bouzkachi, et ignorant le reste du monde, sans toutefois le mépriser.
   
Si l’histoire de l’Afghanistan ressemble à un cadavre exquis surréaliste, triste agrégat de maints épisodes syncopés, révolution et contre-révolution, république et monarchie, c’est en 1978, avec l’invasion du pays par les troupes soviétiques, que la région sombre dans le chaos. S’en suivront dix ans de guerre, qui épuiseront cette grande malade qu’était déjà l’URSS, et qui laisseront l’Afghanistan exsangue.

Evidemment la figure de Massoud, commandant de l’Alliance du nord, dont l’assassinat en 2001 marqua le début d’un cycle international de perturbations guerrières entre le monde arabe et l’occident, s’impose dans cette sombre histoire. Massoud l’Afghan. Massoud le résistant. Il n’est, cependant, que l’ombre de l’ombre des « cavaliers » de Kessel. Partageant leur noblesse, certes, mais partageant aussi la faiblesse et la médiocrité de notre temps. ( A t-on idée de se faire tuer par une caméra de télévision piégée ? N’est-ce pas là le destin d’une icône médiatique ?) Ce sont bientôt les talibans islamistes qui s’installent au pouvoir, et imposent aux populations leurs fanatiques dictats religieux et politiques. La suite est connue, elle est dans tous les livres : l’attentat contre les Twin-towers, et la libération de l’Afghanistan par les troupes US. Depuis le peuple est libre, mais la guerre civile fait rage… chaque semaine des dizaines de personnes sont tuées dans des attentats permanents, et le sentiment anti-occidental, tel un cancer, progresse incontestablement.

On comprend mieux le sentiment de désarroi de Schoendoerffer, revenant à Kaboul avec le 1er RCP. L’Afghanistan qu’il avait voulu montrer, avec Kessel, est aussi détruit que les grands Bouddhas des montagnes, aussi ravagé que les temples antiques réduits en poussière dans la vallée du Panshir… Si Schoendoerffer et Kessel évoquaient avec honnêteté les femmes musulmanes voilées, dans « La Passe du diable », et leur insupportable mise à l’écart de la société des hommes, ils étaient sans doute assez loin de s’imaginer les ravages qu’a pu faire l’islamisme, en quelques années, à un pays déjà terrassé par la guerre. Il faut peu de choses pour mettre fin au règne d’une aristocratie de « cavaliers » des montagnes… il faut bien peu de choses... un prophète suffit.

Ces cinquante ans de solitude font résonner en nous ce proverbe afghan : « Notre passé est sinistre, Notre présent est invivable, Heureusement, nous n'avons pas d'avenir. »




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Visuel en haut à gauche : affiche originale du film "La Passe du diable"



Notes


1 L’auteur a écrit, à propos de l’œuvre de Pierre Schoendoerfer, l’article :  « Crabe Tambour : trouver l’homme au bout de l’océan » dans la Revue de Défense Nationale, de décembre 2007.
2 Ecrite par Béatrice Khadige.
3 A l’image de toute la première partie de son œuvre, dont le remarquable et méconnu « Pêcheur d’Islande », 1958.
4 Pierre Schoendoerffer « A Kaboul avec les paras du 1er RCP », Le Figaro, 8 novembre 2007
5 A propos de son film Kessel écrira dans France Soir le reportage titré avec espièglerie  : « J’ai fait tourner les fils de Gengis Khan » ( France Soir, du 3 au 19 décembre 1957 ).
6 Yves Courrière, Joseph Kessel ou Sur la piste du lion, Plon, p. 704.
7 Ibid.
8 Georges de Beauregard produira ensuite la quasi-totalité des films de Pierre Schoendoerffer, dont quelques grands succès dont « 317ème Section », « Le Crabe Tambour » et « Dien Bien Phu ».
9 Ibid. p. 710
10 Ibid. p. 712.
11 Ibid. p. 740
12 Ibid.
13 Il a été rendu accessible au grand public par le site de Video on demand de MK2 : www.mk2vod.com




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13 novembre 2007 2 13 /11 /novembre /2007 20:20
affiche-crabe.jpg
L’article « Le Crabe-Tambour : trouver l’homme au bout de l’océan », consacré au film de Pierre Schoendoerffer, a été publié par la Revue de Défense Nationale - dans son édition du mois de décembre ( cf. mon précédent post à ce sujet ). Il a été également rendu disponible sur le blog Stalker de Juan Asensio.




Le long-métrage Le Crabe-tambour, de Pierre Schoendoerffer, est adapté de son roman éponyme paru en 1976 et couronné par le Grand Prix du roman de l'Académie française. Cette histoire de marins, complexe et philosophique, sur fond de quête insensée de l’homme et de nostalgie coloniale, fut un grand succès commercial. Il n’était pourtant pas aisé pour Schoendoerffer d’imposer son univers à une France des années 70, encore mollement contestataire et recroquevillée sur un tropisme pseudo-subversif né de mai 68. Quel est l’univers de Schoendoerffer ? Un monde perdu et idéalisé, contre-culturel, où des valeurs morales telles que la droiture et l’honneur l’emportent sur toute autre considération; un univers très ancienne France, un peu en ruine, où des institutions telles que l’église catholique et l’armée ont encore un prestige réel et une authentique autorité au sein de la société
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1 septembre 2007 6 01 /09 /septembre /2007 00:05

Nous fêtons cette année les trente ans du film mythique de Pierre Schoendoerffer Le crabe Tambour ( 1977 ) ; épopée militaire, austère et lyrique, à la gloire d’un héros ambigu de la guerre d’Indochine, pris dans le mouvement « Algérie française »…  

 



affiche-crabe.jpg

Affiche du Crabe Tambour : lyrisme et austérité




Accéder à la bande-annonce du Crabe Tambour en cliquant sur ce lien.


 

A cette occasion la Cinémathèque française consacrera une rétrospective à l’œuvre de Pierre Schoendoerffer, du 21 novembre au 2 décembre 2007. A ne surtout pas manquer : certains films programmés sont parfaitement introuvables en dvd/vhs…

 



schoendoerffer.jpg

Pierre Schoendoerrfer, réalisateur, écrivain

 

 
 


 

Dans la prochaine livraison de la Revue de Défense Nationale ( début octobre ), je signe une analyse de neuf pages sur le Crabe Tambour. En voici l’introduction, en avant-première.

 

 

« CRABE TAMBOUR » : trouver l’homme au bout de l’océan.
 

 

Par François-Xavier Ajavon.

 

 
 

« Il y a trois sortes d’hommes : les vivants, les morts,
et ceux qui sont en mer »

 

Platon

 

 

 

 

En 1977, il y a trente ans cette année, sortait sur les écrans français le long-métrage de Pierre Schoendoerffer Le Crabe Tambour, adapté de son roman éponyme, paru en librairie l’année précédente et couronné par le Grand Prix du roman de l’Académie française. Cette histoire de marins, complexe et philosophique, sur fond de quête insensée de l’homme et de nostalgie coloniale, fut un grand succès commercial. Il n’était pourtant pas aisé pour Schoendoerffer d’imposer son univers à une France des années 70, encore mollement contestataire et recroquevillée sur un tropisme pseudo-subversif né de mai 68. Quel est l’univers de Schoendoerffer ? Un monde perdu et idéalisé, contre-culturel, où des valeurs morales telles que la droiture et l’honneur l’emportent sur toute autre considération ; un univers très ancienne France, un peu en ruine, où des Institutions telles que l’église catholique et l’armée ont encore un prestige réel et une authentique autorité au sein de la société.

 

 

 

Pour Schoendoerffer ( engagé volontaire en Indochine en 1952 et prisonnier à Dien Bien Phu en 1954 ), la mise en scène de militaires est un moyen d’atteindre l’homme dans sa plus pure condition, et de s’interroger sur l’étendue de ses choix moraux : « J’ai choisi de montrer dans mes films des militaires (…) Ce qui m’intéresse dans la condition militaire, c’est que c’est une société sans profit, qui a une certaine rigueur intérieure, une organisation stricte, et cela m’a permis de pouvoir élaguer tout ce ‘petit quotidien’ qui ne m’intéressait pas ». Schoendoerffer avait déjà abordé plusieurs fois l’univers militaire ( 317 ème Section, en 1964, sur quelques épisodes de la guerre d’Indochine ) et il reviendra à cette thématique avec L’honneur d’un capitaine, en 1982, sur la guerre d’Algérie, puis avec Dien Bien Phu, en 1992 ; ou encore avec Là-haut ( Un roi au-dessus des nuages ), en 2004, sur la question de la mémoire de l’armée.

 

 

 

Avec le Crabe Tambour, Schoendoerffer donne sa plus fine réflexion morale et philosophique sur la condition humaine en général et la condition militaire en particulier, autour d’axiomes tels que l’honneur, le mépris de la mort, la prééminence de l’intérêt collectif sur les angoisses intimes, la liberté de conscience, ou encore la question ( et donc la remise en question ) du respect d’une autorité hiérarchique et politique.

 

 

 

La Marine Nationale, entre épopée et allégorie

 

 

 

Le Crabe Tambour raconte la quête presque mystique du commandant d’un escorteur d’escadre de la Marine Nationale ( le Jauréguiberry, dédié à l’assistance à la pêche sur les mers de Terre-Neuve ), qui – sur le point d’être emporté par un cancer - veut revoir une dernière fois un héros ambigu et légendaire des guerres coloniales françaises, devenu simple pêcheur, Willsdorff, surnommé le « Crabe Tambour ». Le film est construit autour du dialogue entre ce commandant ( joué par Jean Rochefort ) et le médecin de bord ( Claude Rich ), qui ont tout deux connu ce militaire atypique, quelque peu « anarchiste de droite », incontrôlable et poète… dialogue émaillé de flash-back sur le parcours du « Crabe Tambour » ( joué par Jacques Perrin ) depuis la guerre d’Indochine jusqu’à la guerre d’Algérie, durant laquelle son engagement en faveur de l’Algérie française après le putsch des généraux lui vaudra plusieurs années de prison. Cette narration croisée, entrecoupée de plans oniriques sur le Jauréguiberry fendant les flots, est ponctuée, aussi, d’incises poétiques sur le discours décousu du chef mécanicien ( joué par Jacques Dufilho ) témoignant, depuis le carré des officiers, de la morale catholique confuse de son « recteur fou », en  pays Bigouden.

 


(...)

 

La suite au mois d’octobre dans la Revue de Défense Nationale.



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3 juin 2007 7 03 /06 /juin /2007 23:47

"…le choix de l’homme n’est pas entre ce qu’il croit être le bien et le mal…

 



L'escorteur d'escadre Jauréguiberry

 

…mais entre un bien et un autre bien… il faut choisir…"


Bande-annonce du Crabe-Tambour.



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